Quel modèle économique pour la presse haïtienne ?

Article : Quel modèle économique pour la presse haïtienne ?
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1 octobre 2019

Quel modèle économique pour la presse haïtienne ?

Une presse qui n’investit pas dans l’innovation, une presse qui n’arrive pas à se défaire des liens funestes qu’elle entretient avec soit le gouvernement, soit avec le secteur des affaires, est une presse en décadence.

Dans cet article, je ne me fixe pas l’objectif d’analyser et de proposer un modèle économique aux médias. Son but est de mener une réflexion sur le financement de la presse et des médias en Haïti.

Avec l’expansion du numérique, c’est tout l’écosystème de nos médias qui est en train de payer la lourde facture de cette révolution technologique. Et pourtant, on dirait que ce débat n’intéresse personne. Les solutions se font encore attendre.

Pourtant, dans un contexte de montée en flèche des fake news, et cela couplé à une méfiance grandissante envers les médias, réinventer la presse haïtienne reste donc la seule solution pour nous épargner une mort lente mais certaine de nos différents médias.

Et c’est pourquoi, je pense qu’il est primordial de sauver l’information, le plus grand bien public de notre monde. Car on le dit souvent, et c’est bien vrai : l’information est pouvoir.

Mais pour cela, il faut un libre accès à l’information pour les citoyens, et une liberté de la presse garantir pour nos médias. C’est la raison pour laquelle la presse doit rester loin des puissances économiques.

Néanmoins, il faut le reconnaitre, avoir une presse où on peut combiner qualité et indépendance, cela coûte cher. Et c’est là que je fais appel au bon sens du citoyen, il faut un financement massif de la part de tous les citoyens pour relever ce défi.

Qui finance la presse en Haïti ?

Depuis quelques mois, je mène des réflexions sur l’importance du financement participatif dans le secteur de la presse. En effet, je crois que pour avoir les bonnes informations, les vraies informations, il ne suffit pas seulement d’avoir des journalistes crédibles, il faut une contribution de chaque citoyen.

Une participation qui permettrait que les journalistes puissent partir à la conquête d’informations assez pertinentes pour le public. Ce sera sans doute aussi une façon de créer une presse totalement libre qui travaillerait au bénéfice des citoyens et non pas pour des intérêts privés, ou pour des puissants cherchant à contrôler la presse pour qu’elle leur soit bénéfique.

Aujourd’hui, après les recettes publicitaires, il est quasiment impossible de trouver des informations pertinentes concernant le financement de nos médias. En effet, nos médias ne sont pas assez transparents, il est difficile de savoir officiellement la provenance de leurs sources de financement.

Ce qui laisse planer un doute légitime sur le mode de fonctionnement de nos médias et des dérives graves dans le secteur. Pourtant la précarité des médias nous saute aux yeux.

Qui peut alors venir à leur rescousse ?

Dans un monde qui change constamment et dans un pays où la situation socioéconomique se détériore de jour en jour, Il est temps de penser le développement de la presse à long terme et d’essayer de voir comment financer nos médias pour les vingt prochaines années.

Sachant le rôle et l’importance des entreprises médiatiques dans le paysage démocratique et culturel d’un pays comme le nôtre, il serait important que la corporation puisse s’asseoir pour réfléchir et discuter sur l’avenir des médias en Haïti.

Le défi est de taille, et on aura besoin du soutien de tout le monde pour réinventer un autre modèle de médias dans le pays. Ailleurs, il y a des initiatives assez intéressantes qui se font, comme par exemple le projet :

« Construisons ensemble la première communauté dédiée à l’innovation et l’entrepreneuriat dans les médias. »

Je suis persuadé que notre démocratie dépend d’un journalisme de qualité, et surtout libre.

Il existe de nouvelles idées pour le financement du journalisme pouvant garantir la liberté des médias, je pense par exemple au financement participatif. On pourrait aussi parler de la création d’un fonds d’aide aux médias afin de promouvoir l’innovation journalistique et la création de nouvelles offres de médias dans le pays.

Il est bien clair pour tout le monde que le bon journalisme coûte cher. Car pour une production de qualité et fiable, les médias qui ont besoin de mener des enquêtes approfondies basées sur la vérification des faits, doivent pouvoir compter sur l’implication directe des citoyens et non pas des groupes financiers ou de l’état.

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Commentaires

Mylène
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Nelson, tu t'attaques vraiment à à un enjeu complexe, difficile, et qui m'interpelle bien sûr. En Guadeloupe, où nous sommes 400 000, nous n'avons pas les mêmes capacités qu'en Haïti, en matière de modèle économique. Nos médias se débattent tant bien que mal. Notre unique quotidien est en passe peut-être de disparaître... La difficulté est bien là. Que faire ? Le métier de journaliste fait partie de ceux menacés par tant de problématiques : faiblesse financière, manque de formation, numérisation indispensable, absence d'intérêt du public, coûts importants en terme de personnel et d'appareils... Il faut sans cesse se battre pour capter l'attention des annonceurs, institutions, et d'abord des lecteurs/internautes/auditeurs/téléspectateurs. Rien n'est facile. Je dis tout cela, je ne propose pas de solutions, je suis inquiète, et pourtant, je suis convaincue que la presse, les journalistes, trouveront (tant bien que mal) des moyens/voies pour survivre. Dans l'innovation. Dans la spécialisation. Ou autre chose. Parce que l'information est clef et qu'elle sera toujours indispensable.

Nelson Deshommes
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Le secteur est en crise depuis plusieurs années, cependant, comme tu le dis, je crois qu’on pourra trouver une solution. Mais, il faudrait que nous prenons conscience que cette crise existe, ce qui ne me semble pas le cas chez moi. Et c’est de là vient ma plus grande inquiétude.